La narration journalistique prend ses quartiers

narrativejournalismLe journalisme narratif (re)traverse l’Atlantique

Le récit a toujours existé. Il est au cœur même du principe de storytelling.

Le journalisme narratif (narrative journalism) aussi a toujours existé. Mais il a pris un nouvel essor particulièrement depuis le développement des nouveaux formats d’édition, notamment numérique.

Ce sont bien sûr les pays anglo-saxons qui ont montré le chemin. La frontière entre journalisme et écriture de forme littéraire n’a jamais été un problème outre-Atlantique où les héros de storytelling font partie de la culture. Dans les années 60-70, il s’inscrivait fortement dans des hebdomadaires comme Time par exemple.

Pour en savoir plus sur sa définition, voici un document extrait des Cahiers du Journalisme datant de 2013.

En France, la narration journalistique prend ses quartiers de manière plus visible. Nos éditions s’y mettent comme le souligne cet article de juin dernier : Attention le journalisme narratif débarque en France.

Même si notre culture, plus intellectuelle que réellement observatrice, n’est pas entraînée à ce style. Lorsque la revue XXI est sortie par exemple, elle en a déstabilisé plus d’un. Pourtant, elle a fait son chemin dans ce type de récit assimilé à du slow journalism.

Est-ce pour autant suffisant ? Il est intéressant de lire dans Newsweek datant de juillet 2015, une lettre du rédacteur en chef qui pense que l’Europe a besoin du journalisme narratif. Il rappelle en passant que ce genre serait né à Londres… bien que cet autre billet se réfère à la réflexion de Voltaire sur le journalisme…

Dans Europe needs narrative journalism, l’éditeur de Newsweek souligne les quatre principales raisons d’un développement timide chez nous :

– le coût engendré par le format
– notre vision très caractéristique de la profession
– la formation : genre peu ou pas enseigné
– notre culture : penser plutôt que voir (les commentaires plutôt que les faits)

Rappelons effectivement que le journalisme narratif est une forme plus longue (long journalism), rejoignant en cela les caractéristiques du journalisme d’investigation (quasi inexistant en France). Et « le temps, c’est de l’argent ». Il faut donc avoir suffisamment de ressources.

L’exemple le plus connu, chez nous, est celui d’Albert Londres qui faisait des reportages extrêmement narrés. Il racontait ses voyages, ses rencontres et ses expériences, faisant véritablement pratique du journalisme narratif.

Il y a toujours peu d’exemples en France : on peut citer Florence Aubenas qui, via les journaux ou des livres, décrit des situations sur le terrain, quasiment en immersion.

Mais elle dit être tout à fait consciente de la chance d’avoir les moyens aujourd’hui de prendre son temps pour le faire, pour aller voir et reporter en mode narratif, genre qu’elle considère comme « la religion des faits ».

Ce genre – notamment à travers le digital storytelling – est en passe de se développer rapidement, voire de s’imposer.

Sources
:
L’instinct du récit, de Robert Fulford, éditions Fides, 2001
Les Cahiers du Journalisme
Cahiers de Narratologie / Fictions du réel, le journalisme narratif
http://atelier.rfi.fr/

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